Un logement est dit « non décent » lorsqu’il ne garantit pas les conditions minimales de confort, de sécurité et de salubrité exigées par la réglementation. Les locataires confrontés à ce type de situation peuvent engager des démarches pour signaler les faits et demander des réparations ou une mise aux normes. Mais avant tout, il faut identifier les critères précis qui définissent un tel logement et savoir vers qui se tourner pour établir un constat reconnu.
Critères précis d’un logement non décent
Une surface et un volume habitables minimum
Pour répondre aux normes de décence, un logement doit disposer d’au moins 9 m² de surface habitable pour une personne seule, avec une hauteur sous plafond minimale de 2,20 mètres. Cela correspond à un volume habitable de 20 m³. En deçà, le logement ne peut être loué légalement.
Des éléments de confort et d’hygiène obligatoires
Le logement doit être pourvu :
- D’un système de chauffage en bon état de fonctionnement
- D’une installation d’alimentation en eau potable, avec eau chaude et froide
- D’équipements sanitaires (WC intérieurs séparés de la cuisine, douche ou baignoire)
- D’une coin cuisine avec évier branché sur une arrivée d’eau et une évacuation
L’installation électrique, de gaz et de ventilation doit pouvoir fonctionner sans danger, et permettre une circulation saine de l’air.
Une sécurité physique des occupants
Les structures du logement (murs, sols, plafonds) doivent être stables et en bon état. Sont interdites :
- Présence massive d’humidité ou moisissures
- Fissures importantes
- Infiltrations ou remontées capillaires non traitées
- Canalisations vétustes, à nu, ou fuyardes
- Présence de nuisibles (rats, punaises de lit, cafards…)
Une performance énergétique minimale
Depuis le 1er janvier 2023, les logements dont la consommation énergétique dépasse 450 kWh/m²/an sont jugés non décents. Le calendrier réglementaire prévoit le retrait progressif des logements les plus consommateurs :
Année | Seuils réglementaires |
---|---|
2023 | Interdiction de louer un logement consommant > 450 kWh/m²/an |
2025 | Fin de location des logements classés G au DPE |
2028 | Interdiction des logements classés F et G |
2034 | Interdiction des logements classés E, F et G |
Les propriétaires concernés doivent soit effectuer des travaux de rénovation énergétique, soit renoncer à la mise en location à terme. Plusieurs aides existent pour y parvenir, comme détaillé dans notre dossier sur les aides à la rénovation.
Vers qui se tourner pour un constat de non-décence ?
Les démarches amiables en premier recours
Avant toute procédure formelle, il est recommandé au locataire de signaler les problèmes constatés au propriétaire. Un courrier ou une lettre recommandée exposant les désordres est souvent nécessaire pour enclencher la mise en conformité ou des travaux.
Le Pôle départemental de lutte contre l’habitat indigne (PDLHI)
Le PDLHI est l’interlocuteur clé. Ce service interministériel coordonne les interventions sur les logements insalubres ou dégradés. Il instruit les signalements et oriente vers les services compétents. On peut le contacter via la préfecture ou le site Signal Logement.
La mairie ou l’agence régionale de santé (ARS)
Le service communal d’hygiène ou l’ARS peut demander une visite des lieux si les conditions sanitaires sont préoccupantes : présence de nuisibles, humidité excessive, dégats structurels, etc. Leur rapport peut être transmis au préfet pour décision administrative.
La CAF et son outil d’auto-diagnostic
Pour les bénéficiaires d’aides au logement, la Caisse d’allocations familiales met à disposition une grille d’évaluation de la décence. En fonction des réponses, une enquête peut être déclenchée. Cette démarche est utile pour prouver que le logement pose problème, même sans expertise technique avancée.
Le commissaire de justice pour un constat officiel
Seul un commissaire de justice (anciennement huissier) peut produire un procès-verbal opposable devant les tribunaux. Il se rend sur place, note objectivement les malfaçons ou anomalies, et produit un document circonstancié, souvent décisif en cas de litige. Ce type de prestation est payante, mais elle sécurise juridiquement toute contestation.
L’expertise privée complémentaire
Certains professionnels indépendants peuvent établir une expertise immobilière complète : ingénieurs du bâtiment, architectes, thermiciens. Une source neutre et objective, notamment si le logement présente aussi des problèmes de performance énergétique ou d’humidité structurelle. Des associations comme la ANIL peuvent orienter vers des interlocuteurs reconnus.
La marche à suivre pas à pas
Voici les étapes recommandées pour établir la non-décence d’un logement :
- Rassembler des preuves : photos, vidéos, échanges écrits
- Informer le propriétaire et demander la réalisation de travaux
- Envoyer une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception
- Contacter les services compétents selon la nature du problème (ARS, mairie, PDLHI)
- Faire réaliser un constat formel par un commissaire de justice
- En dernier recours, saisir le tribunal judiciaire pour faire valoir ses droits
En cas de constat officiel, les autorités peuvent imposer des travaux obligatoires au propriétaire, voire adopter un arrêté d’insalubrité interdisant la location.
Sanctions et protections prévues
Un propriétaire qui persiste à louer un logement jugé non décent s’expose à plusieurs sanctions : suspension des aides au logement, injonction de travaux, voire astreinte financière. Le locataire peut demander une diminution du loyer et un dédommagement. Contrairement à certaines idées reçues, la non-décence ne donne pas droit à une expulsion du locataire si celui-ci respecte ses obligations de paiement.
Pour tout signalement sérieux, la loi protège le locataire, et impose au propriétaire de maintenir le logement dans un état conforme, dès la signature du bail et pendant toute la durée de la location.