Sous-évaluation du loyer : le bailleur peut-il augmenter fortement au renouvellement ?

Lorsqu’un loyer est manifestement sous-évalué, le bailleur peut être tenté de le réajuster au moment du renouvellement du bail. Si cette option existe bien légalement, elle suppose le respect d’un encadrement strict, tant sur le fond que sur la forme. Tour d’horizon des conditions, des limites et des démarches à suivre pour les propriétaires.

Augmenter un loyer sous-évalué : un droit encadré

En théorie, un propriétaire a le droit de demander une réévaluation du loyer lorsque celui-ci est manifestement inférieur au marché local. Cette possibilité concerne uniquement la phase de renouvellement du bail, et non une révision annuelle classique.

Mais ce droit est conditionné. Il ne peut être appliqué sans preuve concrète ni sans respecter un calendrier précis. Le bailleur doit notifier sa proposition de nouveau loyer au locataire au moins 6 mois avant le terme du contrat actuel, par lettre recommandée avec accusé de réception. Une négociation peut alors s’ouvrir. En l’absence d’accord à échéance du bail, c’est le juge qui tranche.

Quels logements ne peuvent pas voir leur loyer augmenté ?

Depuis le 24 août 2022, une interdiction totale s’applique aux logements classés F ou G sur le Diagnostic de performance énergétique (DPE). Ces passoires thermiques ne peuvent faire l’objet d’aucune augmentation de loyer, y compris au renouvellement du bail.

Cette interdiction s’inscrit dans le cadre des mesures de lutte contre l’habitat énergivore. Elle concerne actuellement des centaines de milliers de logements en France.

Ce que dit la loi selon la localisation du bien

En zone tendue : procédure rigide, plafonds stricts

Dans les communes classées en zone tendue, le propriétaire ne peut pas fixer librement un nouveau loyer, même en cas de sous-évaluation du précédent. L’article 17-2 de la loi du 6 juillet 1989 impose une méthode de calcul et des justificatifs précis :

  • Le bailleur doit joindre des références de loyers comparables : au moins 6 dans les villes de plus d’un million d’habitants, 3 ailleurs.
  • L’augmentation est plafonnée au plus élevé des deux montants suivants :
Méthode de calcul Limite
50 % de la différence entre le loyer pratiqué et les loyers du voisinage Exemple : si l’écart est de 200 €, vous pouvez proposer +100 €
15 % du montant des travaux effectués Uniquement pour des travaux d’amélioration ou de mise aux normes

Ce système vise à préserver l’équilibre du marché dans ces secteurs à forte tension locative.

Hors zone tendue : marge de manœuvre plus large

Dans les zones non classées comme tendues, la réglementation laisse davantage de liberté au bailleur. Le loyer peut être ajusté sans plafond spécifique, à condition de proposer un montant cohérent et justifié. Les comparaisons doivent reposer sur des logements semblables (surface, étage, prestations, localisation).

Le locataire peut refuser cette hausse. En absence d’accord, là encore, un juge peut être saisi, notamment si la hausse paraît déconnectée des loyers du voisinage.

Quelles justifications fournir ?

Pour motiver une demande de hausse, le propriétaire doit s’appuyer sur des références précises, issues du marché local. La proposition de renouvellement doit aussi inclure certains éléments obligatoires selon la loi :

  • La reproduction intégrale du texte de l’article 17-2 de la loi de 1989
  • La liste complète des références de loyers (adresse, surface, étage, charges incluses ou non…)
  • Le montant du nouveau loyer proposé

Sans ces éléments, la demande peut être considérée comme invalide juridiquement.

Quel est l’objectif de ce mécanisme encadré ?

L’augmentation au renouvellement permet aux propriétaires de réajuster les loyers qui ont échappé à une indexation régulière. Ce mécanisme est utile notamment dans le cas d’anciens baux à loyers très bas, voire inférieurs au seuil social, comme détaillé dans cet article sur Vilogi.

Le marché illustre ces écarts : selon l’INSEE, les loyers dans le parc social atteignent en moyenne 7,38 €/m², contre 14 €/m² dans le secteur privé. Dans certaines grandes métropoles, cette différence dépasse 200 %.

Ce processus encadré permet un rattrapage partiel, mais uniquement dans la limite des règles légales. Il ne doit pas être confondu avec une augmentation libre comme dans le cas d’une relocation. Le sujet est d’ailleurs voisin de celui du gel des loyers et de sa compatibilité avec la décence du logement, tel que détaillé dans notre dossier sur les règles de décence liées à la performance énergétique.

La négociation reste centrale

Une proposition d’augmentation ne signifie pas acceptation automatique. Le locataire peut :

  • Accepter la hausse proposée
  • Refuser l’augmentation, ce qui mène à une discussion ou à une saisine du juge
  • Partir à la fin du bail pour éviter la hausse, ce qui oblige le bailleur à relouer

La relation contractuelle se poursuit uniquement si les deux parties s’accordent. C’est pourquoi il est souvent recommandé de privilégier le dialogue au contentieux, surtout dans les zones où la rotation de locataire peut être coûteuse pour le propriétaire.

En conclusion, la hausse de loyer en raison d’une sous-évaluation reste possible mais fortement régulée. Tout projet d’augmentation doit être anticipé, préparé et justifié, en intégrant les règles propres à la zone géographique et aux caractéristiques du logement. Cette précaution limite les litiges et préserve une certaine équité entre bailleurs et locataires.

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LaRedac
Rédaction du site locama immobilier. Nos articles sont choisi par des passionnés de l'immobilier. La rédaction s'appuie sur des textes de loi, des références officielles ainsi que l'intelligence artificielle pour rédiger les articles du blog.

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